« - Dis Ohno, tu sais que je suis toujours partant pour aller boire un verre avec toi mais pour quelqu’un qui voulait me parler, tu n’es pas très causant.
- Désolé mais en fait je ne sais pas comment te le dire.
- Vas-y vide ton sac.
- Est-ce… Est-ce que tu as déjà été attiré par un de tes élèves ? »
Il me regarde sous le choc. A vrai dire je n’en reviens pas moi-même d’avoir dit ça tout haut.
« - Heu… Laisse tomber…
- Oui
- Hein ?
- Oui, j’ai déjà eu une relation avec une élève. »
Cette fois c’est moi qui reste à le regarder sous le choc. Je le vois fouiller dans la poche intérieure de sa veste et en sortir son portefeuille. Il me montre une photo.
« - Je te présente ma femme Minami et mon fils Ryosuke
- Tu as une belle petite famille mais pourquoi tu me montres cette photo ?
- Minami est l’élève dont je t’ai parlé. »
Mon regard voyage de la photo à Sho et inversement. Il se met à rire en voyant mon air ahuri.
« - Mais… mais comment vous avez fait ? Je veux dire, elle était mineure…
- J’avoue qu’au début ça n’a pas était facile. J’en avais vingt-quatre et elle dix-sept. Pour moi ça n’était pas normal. Je me considérais comme un monstre… »
J’écoute son histoire avec attention et je me rends vite compte que tout ce qu’il a ressenti, je le ressens aujourd’hui.
« - Enfin tout ça pour te dire que malgré toutes les difficultés qu’on a traversées, je suis l’homme le plus heureux au monde. Si je peux te donner un conseil, suis ton cœur et ne te préoccupe pas de ce que peuvent penser les gens. »

« - Tadaima.
- Ta mère n’est pas là »
Il est encore là lui. Cet ivrogne est le nouveau petit copain de ma mère. Décidément, c’est de pire en pire.
« - Je vais dans ma chambre.
- … »
J’en ai marre de cette vie. Tous les jours, c’est la même chose. Je m’efforce de sourire et de rire avec mes amis mais intérieurement, je n’ai qu’une envie, leur crier « vos gueules ». Quand je rentre chez moi, c’est pour retrouver cet enfer qu’est ma vie de famille. Ma mère m’ignore de plus en plus, ça seule lubie et de cuver sa bière et de se trouver un nouveau mari et depuis qu’elle a rencontré ce type, c’est dispute et bagarre tous les soirs.
Les seuls moments où je me sens bien, c’est pendant les cours d’anglais. Je peux admirer Ohno sensei. Je ne peux pas oublier le baiser qu’on a échangé mais ce qui me rend triste c’est qu’il m’évite depuis ce jour.
« - T’as vu l’heure ? T’étais où ?
- Ca ne te regarde pas.
- T’étais avec un autre.
- Lâche-moi
- T’es qu’une trainée… »
Et c’est reparti. Pff j’en ai marre. Vivement que je me tire d’ici. Ne pouvant dormir, je décide de sortir. Ils sont tellement pris par leur dispute, qu’ils ne remarquent pas mon départ. Je divague dans les rues sans savoir où mes pas me mènent quand mon regard s’arrête devant une scène que je n’aurais jamais voulu voir. Ohno sensei est là devant moi et il sert dans ses bras une femme. Alors ce baiser ne représentait rien pour lui. Sans m’en rendre compte je prends mes jambes à mon cou.

« - Nee-chan, tu m’as manqué. Comment vont les parents ?
- Ils vont bien. Et toi ? Et les amours ?
- Nee-chan arrête avec ça. »
Je ne peux pas lui dire que je suis tombé amoureux d’un de mes élèves et d’un garçon de surcroit.
« - Mais les parents veulent des petits-enfants.
- Pff, vous êtes lourds avec ça. Et… et toi ? Tu n’as qu’à en faire.
- Ok, ok j’arrête. On va boire un verre.
- Tu m’invites !?
On part dans un petit bar et on passe la soirée à rire et se rappeler des souvenirs.
Le lendemain et avec une belle gueule de bois, je souhaite bon retour à ma sœur. J’ai rarement vu une fille qui peut boire autant et être fraîche comme une rose le lendemain.
« - Salut Ohno
- Lut’
- Houlà c’est quoi ste tête.
- Ne m’en parle pas. Tiens c’est quoi cet attroupement.
Sho et moi approchons et remarquons qu’ils regardent tous vers le haut.
« - Que se passe-t-il ?
- C’est Nino, il… Il veut sauter »
Pas ça, non. Sans réfléchir, je cours vers le bâtiment.